Antiracisme : un petit shopping ? Par Ben

La lutte contre le racisme ne doit pas se faire au cas par cas, en fonction de quel groupe est touché ou même quelle personne est touchée. Toute géométrie variable se paie cash. On est contre le racisme entièrement… ou bien on est une partie du problème.

Ces derniers mois ont été marqués par des débats puants autour de faits racistes. Même si certains avaient du mal à dire à qualifier ces faits comme tels. 

ANTISMEMITISME

De nombreux actes antisémites se sont produits en ce début d’année 2019. Et c’est tout à fait impressionnant qu’autant de personnes aient pu être à ce point dans le déni : Quand un Français juif, né en France, s’entend dire « sale merde, la France elle est à nous » et « retourne à Tel Aviv » c’est du racisme un point c’est tout. La notion de racisme ne dépend pas des qualités que l’on prête à la personne qui en est victime mais de la nature du propos. C’est incompréhensible qu’autant de personnes aient pu se contorsionner dans tous les sens pour justifier de telles paroles.

Quelques jours plus tard, le carnaval d’Alost mettait notamment en scène un “char de juifs” reprenant tous les stéréotypes antisémites imaginables. Il n’y a eu de condamnation, ni de la ville ni des organisateurs.

L’intellectuel décolonial Frantz Fanon disait «Quand vous entendez dire du mal des juifs, dressez l’oreille, on parle de vous.». Qu’il y ait autant de gens, parmi les progressistes, qui ne dressent plus l’oreille, voir justifient, ça  fout vraiment les boules.

ISLAMOPHOBIE

Puis on eu l’affaire autour du hijab de sport de décathlon, et la, on a vu une série de personnes – qui n’avaient pas de mots assez durs pour qualifier l’antisémitisme les semaines d’avant – , plonger dans l’islamophobie la plus crasse. Aurore Bergé, porte-parole de la République en Marche a écrit  » certes porter un voile pour aller courir est légal mais que ce n’est «  pas l’idée que nous avions de la civilité ». C’est tout à fait hallucinant qu’en 2019 on en soit encore à expliquer à des femmes ce qui serait « civilisé » de porter ou non. Cette obsession française autour du voile, qui en plus focalise son islamophobie une fois de plus sur le corps des femmes, contamine beaucoup trop la Belgique francophone. Dans le monde anglo-saxon, ils n’ont visiblement pas cette névrose autour du voile et ainsi la liberté religieuse et vestimentaire ne s’arrête pas lorsqu’il s’agit des musulmanes.  Les conséquences de ces obsessions islamophobes ne sont pas anodines…  La tuerie de Christchurch est là pour le rappeler.

Pourquoi je vous parle aujourd’hui conjointement de ces deux types de racisme et d’exclusion que sont l’antisémitisme et l’islamophobie ? Car ces haines, on tente trop souvent de les opposer.. Les gens choisiraient un peu leur camps : « t’es plutôt lutte contre l’islamophobie ou lutte contre l’antisémitisme toi ? ». Et une fois le camp choisi, on va dénoncer l’un et justifier/diminuer/nuancer l’autre. En faisant ça, c’est le racisme qui ressort gagnant, car lui fait son nid dans nos incohérences. La lutte contre le racisme ne se fragmente pas.

Une étude sortie en octobre dernier a demandé à un panel de répondants à travers toute l’Europe s’ils seraient d’accord d’accueillir un juif ou un musulman au sein de leur famille. Globalement on constate une très grande corrélation entre les deux : les pays ou on a le plus de chance d’accepter un juif dans sa famille sont aussi les pays ou on a le plus de chance d’accepter un musulman (et inversement: les pays où on est les moins enclins à accepter d’avoir un juif membre de sa  famille sont aussi les pays où on est les moins enclins à avoir un musulman membre de sa famille). Cela montre un élément déterminant : le rejet entraîne le rejet.

L’islamophobie et l’antisémitisme ne s’opposent pas, ils s’accordent et s’accommodent très bien l’un de l’autre. Je n’ai ici parlé « que » de l’islamophobie et de l’antisémitisme, car ils ont fait l’actualité récente. Mais cela va aussi de pair avec la luttes contre toutes les autres formes de racisme : racisme anti-noir, anti-asiatique, la romophobie,… et la liste peut encore s’allonger. On ne hiérarchise pas. On ne se bat pas contre une forme de racisme au dépend d’une autre.

Laisser un commentaire